item 259 – Lithiase urinaire

Objectifs ECN/CNCI :
Lithiase urinaire
- Diagnostiquer une lithiase urinaire.
– Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
 
 
Plan
Physiopathologie / Facteurs de risque
Examen clinique
Examens paracliniques
Prise en charge thérapeutique
Etiologies
 
Fiche

 

Partie 01 : Physiopathologie

1. Définition

Obstruction aiguë d’une voie urinaire excrétrice
Les coliques néphrétiques ne sont pas toutes d’origine lithiasique. L’obstruction peut être :
– endoluminale : caillot sanguin / nécrose papillaire / parasite : Ascaris
– pariétal : tumeur urothéliale / sténose urétérale (radique, post-op, bilharziose, tuberculose) / syndrome de la jonction pyélo-urétrale
– extrinsèque : tumeur pelvienne / AAA / fibrose rétropéritonéale / ADP rétropéritonéale (lymphome)

2. Formation des lithiases

Mécanismes non complètement élucidés
4 étapes :
– Sursaturation en sels minéraux
– Nucléation
– Agrégation
– Retenue de la lithiase dans les voies excrétrices

3. Composition des lithiases

- Calcique (90%) – radio-opaque :
• Oxalate de calcium
• Phosphate de calicum
– Phospho-ammoniaco-magnesienne – faiblement radio-opaque
D’origine infectieuse (Protéus mirabilis +++)
Il peut grossir rapidement et former des lithiases coralliformes
– Urique – radio-transparent
– Cystinique – radio-transparent
– Médicamenteuse – radio-transparent

4. Facteurs de risque de lithiase urinaire

- Sexe masculin (sex ratio = 2/1)
– Pic de fréquence : 30 – 50 ans
– Déshydratation / Diurèse inférieure à 1l/24h
– Infections urinaires
– Uropathie à l’origine d’une stase urinaire :
• Maladie de Cacchi et Ricci
• Syndrome de la jonction pyélo-urétérale
• Rein en fer à cheval
• Reflux vésico-urétéral
• Méga-uretère congénital
• Polykystose rénale
• Diverticules vésicaux ou caliciels
– Hypercalciurie avec ou sans hypercalcémie
– Hyperoxalurie
– Hyperuraturie :
• avec Hyperuricémie :
▫ Régime riche en viande
▫ Goutte
▫ Syndromes myélo-prolifératifs
• sans hyperuricémie : Diurétique thiazidique
– Médicamenteuse : Indinavir
– Facteur alimentaire : protéine animale / purines
– Facteur familiaux : cystinurie, certaine hypercalcémie congénitale
– Immobilisation prolongée

 

Partie 02  : Examen clinique

1. Interrogatoire

Age
ATCD médico-chirurgico-familiaux :
– Urologiques :
• Colique néphrétique
• Cancer
• Infections urinaires
Rechercher d’autres FDR
TTT :
– Indinavir
Toxiques : OH/Tabac/Autres
Profession
Circonstances de découverte :
– Heure de début
– Facteur déclenchant ?

Signes fonctionnels :
– Douleur brutale et intense
– Unilatérale
– Lombaire le plus souvent
– Irradiation decendante vers les OGE
– Avec accès paroxystiques
– Absence de position antalgique
– Signes fonctionnels urinaires associés :
• Signes irritatifs (si lithiase proche de la vessie) :
▫ Pollakurie
▫ Urgenturies
▫ Brûlures mictionnelles
• Signes obstructifs :
▫ Dysurie
▫ Miction par regorgement
– Agitation liée à la douleur
– Nausées/Vomissements
– Iléus réflexe

Heure du jeûne

2. Examen physique

> Constantes :

TA, FC, FR, SpO2, BU, EVA, diurèse :
– BU : Hématurie microscopique
– EVA : Recherche d’une forme compliquée hyperalgique malgré un TTT antalgique bien conduit
– Diurèse : Recherche d’une forme compliquée anurique
– T°C : Recherche d’une forme compliquée hyperthermique = Pyélonéphrite obstructive

> Inspection :

- Agitation liée à la douleur

> Palpation :

- Abdomen souple
– Percussion lombaire : Ebranlement très douloureux
– Touchers pelviens : TR ± TV
– Palpation des orifices herniaires
– Palpation lombaire à la recherche d’un contact lombaire

 

Partie 03 : Examens paracliniques

1. Bilan diagnostique

- ASP F debout
Recherche d’une lithiase radio-opaque sur le trajet des voies urinaires

- Echo-doppler rénal et des voies urinaires
Si tableau typique non grave
• Calcul : hyperéchogène et cône d’ombre postérieur
• Obstruction : dilatation des CPC, absence de jet urétéral

- TDM abdomino-pelvienne sans injection
Si tableau atypique / grave / calcul non retrouvé à l’ASP ou l’échographie
Ne pas injecter car risque d’IRA !
• Positif : Calcul + couronne hypodense autour du calcul
• Retentissement : obstruction = dilatation des CPC / pâleur du rein
• Différentiel : anévrysme de l’aorte abdominale / compression extrinsèque tumorale

2. Biologiques

- hCG chez la femme en âge de procréer
– NFS/Plaquettes : Hyperleucocytose ?
– CRP : Syndrome inflammatoire biologique ?
– Ionogramme sanguin
– Urée/Créatininémie : IRA ?
– ECBU
– Hémocultures aéro- anaérobies si T°C > 38,5°C

3. Bilan pré-thérapeutique

En cas de forme compliquée
– Hémostase : TP/TCA ± INR
– Groupage/Rhésus/RAI
– Appel urologue + Cs Anesthésie

4. Bilan étiologique

Non indispensable devant un 1er épisode non compliqué
Indications :
– Récidive
– Rein unique
– Lithiase de enfant
– Lithiase compliquée

A distance de la crise (1 mois) :
– Uro-TDM sans puis avec injection de PDC iodé
Visualise tous les calculs (sauf l’indinovir)
Analyse de la densité : nature du calcul

- Bilan métabolique :
• Sanguin :
▫ Iono / Urée/Créat
▫ Glycémie à jeûn
▫ Bicarbonates
▫ Magnésémie
▫ Uricémie
▫ Bilan phosphocalcique
▫ Albuminémie
• Urinaire sur diurèse des 24h :
▫ Calciurie / Uricosurie
▫ Natriurèse
▫ Créatinurie
▫ Citraturie
▫ Analyse du sédiment
• Sur urines fraîches (BU) :
▫ pH
▫ Densité
– Analyse spectrophotométrique infra-rouge (SPIR)
Après récupération du calcul (par tamisage ou TTT chirurgical)
Détermine de façon certaine le type et la composition du calcul

 

 

Partie 04 : Prise en charge thérapeutique

Urgence médicale !

1. TTT ambulatoire

Seulement si :
– Colique néphrétique non compliquée
– Lithiase
– Absence de troubles psychiatriques
– Absence de vomissements itératifs
– Information / Education thérapeutique possible
TTT médical
Conditionnement :
– Repos au lit
– Arrêt de travail
– Patient à jeûn : restriction hydrique transitoire
– VVP transitoire aux urgences
TTT symptomatique aux urgences :
– AINS ++ : kétoprofène 100mg IVL puis relai PO au décours 7J maximum
En l’absence de CI : créatinine normale et hCG négatif si femme
Vasoconstriction de l’artère afférente = ↓ DFG = ↓ tension des cavités pyélocalicielles
– TTT Antalgiques selon EVA :
• Paracétamol 1g en IVL + Tramadol 100mg IVL puis relai PO
• Morphine si besoin (si échec = forme hyperalgique → Hospitalisation
– TTT Anti-spasmodiques : Phloroglucinol IVL puis relai PO

Education
Retour à domicile avec consignes écrites : CN non compliquée / reprise de la diurèse / Antalgie 4 heures après la dernière injection TTT médical PO :
– Antalgique palier 1 : Paracétamol 4g/j PO
– AINS : Kétoprofène 150 mg x 2/j PO pendant les repas pour 7 jours
– Anti-spasmodique : Phloroglucinol 2cp/8h PO
– Alpha-bloquant si calcul de l’uretère pelvien
Mesures hygiéno-diététiques :
– Boissons libres dès la sortie des urgences
– Tamisage des urines pour analyse spectrophotométrique du calcul récupéré
Education du patient ++ :
– Consignes écrites = consulter si fièvre / anurie / hématurie / douleur
– Consultation de contrôle chez le MT entre J3 et J7 après réalisation de l’imagerie

2. Hospitalisation

En cas de contre-indications à un TTT ambulatoire
En cas de complications

> TTT des complications

Urgence médico-chirurgicale !
Pyélonéphrite obstructive :
– A jeun
– TTT médical :
• Remplissage vasculaire si sepsis sévère
• Bi-ATBthérapie synergique, probabiliste, active sur les germes urinaires :
▫ C3G : Ceftriaxone IVL (Fluoroquinolones si CI) + Aminoside : Amikacine IVL pendant 3j puis relais par Fluoroquinolones PO pendant 3 semaines
▫ Secondairement adaptée à l’ATBgramme
– TTT chirurgical = Cysto-urétéroscopie sous AG ou rachianesthésie :
• Drainage des voies urinaires en urgence par sonde urétérale
• Prélèvements bactériologiques d’urines pyéliques + Examen bactériologique

Colique néphrétique hyperalgique :
– A jeun
– TTT médical :
• Titration morphinique puis relai PCA morphine
– TTT chirurgical = Cysto-urétéroscopie sous AG ou rachianesthésie :
• Drainage des voies urinaires en urgence par sonde urétérale
• Prélèvements bactériologiques d’urines pyéliques + Examen bactériologique

Colique néphrétique anurique :
– A jeun
– TTT médical :
• TTT antalgique selon EVA et palier OMS
– TTT chirurgical = Cysto-urétéroscopie sous AG ou rachianesthésie :
• Drainage des voies urinaires en urgence par sonde urétérale
• Prélèvements bactériologiques d’urines pyéliques + Examen bactériologique

Ablation de la sonde urétérale à 1 mois si urines stériles et évacuation du calcul

La dérivation des urines peut également être réalisée à partir d’une néphrostomie percutanée

3. Extraction de la lithiase + Analyse spectrophotométrique

Pour toute lithiase > 5 mm ou non évacuée spontanément
3 techniques :
- Lithotritie Extra-Corporelle (LEC)
- NéphroLithotomie PerCutanée (NLPC)
- Urétéroscopie (URS)
TTT chirurgical d’extraction lithiasique réalisé à distance de l’accès douloureux

 

 

Fig 259.1 Stratégies thérapeutiques des lithiases urinaires
(AFU 2008)

 

Fig 259.1 Recommandations thérapeutiques des lithiases urinaires (AFU 2008)

 

4. TTT préventif

- Hydratation ++ > 2L/j : Boisson abondante et continue
– Rechercher et traiter une étiologie sous-jacente :
• Métabolique : hyperparathyroïdie primaire / hyperuricémie
• Urologique : compression extrinsèque / uropathie malformative
– Mesures hygiéno-diététiques ++ selon l’analyse du calcul :
• Calcique :
▫ Limitation des apports calciques
Si oxalate : réduction des allments riches en oxalate (chocolat, thé, oseille)
• Urique :
▫ Alcalinisation des urines = eau de Vichy 1L/j
▫ Limiter aliments riches en purines (charcuterie, abats)
▫ Allopurinol ssi uricosurie > 4mM/j malgré mesures diététiques
• Cystine :
▫ Alcalinisation par Citrate de potassium
▫ Limiter aliments riches en méthionine (morue, cheval, parmesan)

5. Surveillance clinique et paraclinique de l’efficacité et de la tolérance des TTT

> Examen clinique

- EVA :
• Diminution de la douleur grâce au TTT médical
• Disparition de la douleur après drainage des urines ou évacuation de la lithiase
– Apyrexie si mise en route d’un TTT ATB
– Reprise d’une diurèse
– Evacuation de la lithiase : Tamisage des urines

> Examens paracliniques

- Amikacinémie résiduelle
– Régression du syndrome inflammatoire biologique
– Uro-TDM et/ou une échographie des reins réalisée 4-6 semaines après la colique néphrétique si le calcul n’a pas été expulsé

 

Partie 05 : Etiologies

1. Lithiase radio-opaque

Hypercalcémie (Item 319)
- Hyperparathyroïdie primaire
- Myélome multiple des os (Item 166)
- Métastases osseuses

Hypercalciurie sans hypercalcémie
- Alimentaire :
• Apport excessif de calcium
• Usage de Vitamine D
- Hyperparathyroïdie primaire sans hypercalcémie (15% des HPTP)
- Hypercalciurie idiopathique +++

Anomalie du pH urinaire
- pH élevé (> 6,5) :
• Infections urinaires à germes uréasiques
• Acidose tubulaire distale = Défaut d’acidification des urines
- pH > 8 : Infections urinaires à germes uréasiques

Diurèse faible (
Concentration des composants → Précipitation facilitée

Densité urinaire matinale élevée (> 1020)
Hydratation avant le coucher insuffisante

Hyperoxalurie

Hyperuricurie

2. Lithiase radio-transparente

Lithiase urique primitive
- pH urinaire acide (pH
- Hyperuricurie

Lithiase urique secondaire
- Syndromes myélo-prolifératifs
- Hyperacidité urinaire par perte de bases digestives :
• Diarrhée chronique
• Iléostomie