67 – Anesthésie locale, loco-régionale et générale

Objectifs ECN / CNCI :
Anesthésie locale, loco-régionale et générale
- Argumenter les indications, les contre-indications et les risques d’une anesthésie locale, locorégionale ou générale.
– Préciser les obligations réglementaires à respecter avant une anesthésie.
 
Plan
Anesthésie générale (AG)
Anesthésie loco-régionale (ALR)
Risques anesthésiques
Obligations réglementaires
 
Fiche

 

Partie 01 : Anesthésie générale

1. Produits anesthésiques

> Hypnotiques

Pour la perte de conscience, l’absence de mémorisation

IV :
– Propofol
– Thiopental
– Etomidate
– Kétamine
– Midazolam

Inhalés :
– Sévoflurane
– Desflurane

> Morphiniques

Pour l’analgésie per-opératoire : Limite les réactions sympathiques liées à la douleur
Facilite l’induction par l’analgésie oro-trachéale et la dépression respiratoire

IV :
– Sufentanil
– Rémifentanil
– Alfentanil
– Fentanyl

> Curares

Pour le relachement musculaire
Facilite l’intubation par la myorelaxation des muscles oro-pharyngo-laryngés
– Suxaméthonium = Succinylcholine
– Atracurium
– Cisatracurium
– Rocuronium
– Mivacurium
– Pancuronium
– Vécuronium

Les molécules sont en suppléments, il faut seulement connaître les 3 grandes classes.

2. Déroulement d’une anesthésie générale

> Induction

Phase d’endormissement et de contrôle des VAS :
– Scope + TA + SpO2 ± Curamètre
– Pré-oxygénation à FiO2 100% à 10L/min
Constitue une réserve en saturant les poumons en O2
– Induction de l’anesthésie :
• IV :
▫ Morphinique + Hypnotique ± Curare en chirurgie réglée
▫ Thiopental + Succinylcholine en urgence
• Inhalé par Sévoflurane + Morphinique :
▫ Chez l’enfant hors urgence
▫ Chez l’adulte non coopérant (handicapé)
– Contrôle des VAS :
• Intubation oro-trachéale par laryngoscopie
• Intubation naso-trachéale par laryngoscopie
• Masque laryngé
• Vérification par l’auscultation pulmonaire de la mise en place de la sonde et l’absence de sélectivité

> Entretien

Maintien de l’anesthésie par hypnotique IV ou inhalé
Maintien de l’analgésie par morphinique IV
Vérification des points d’appui après mise en position opératoire
Antibioprophylaxie
Surveillance :
– Hémodynamique :
• TA / FC
• Pertes sanguines
• Hémocue
• Diurèse
– Respiratoire :
• Volume / Pression
• SpO2 / FiO2
• Capnographie
• Absence de respiration spontanée
• Pourcentage d’hypnotique inhalé si entretien par inhalation
– Température
– Analgésie :
• Réactions sympathiques :
▫ Augmentation de la FC, de la TA, de la Capnie
• Diminution de l’imprégnation morphinique :
▫ Perte du myosis morphinique
– Curarisation : Curamètre
30 min avant la fin de l’intervention, lancer l’analgésie post-opératoire IV :
– Paracetamol
– ± Profenid
– ± Nefopam
– ± Tramadol
– ± Morphine si Rémifentanil per-opératoire

> Réveil

Une fois l’intervention terminée, le patient est transféré en Salle de Surveillance Post-Interventionnelle (SSPI).
Le patient peut être extubé en salle d’intervention ou en SSPI.
Critères d’extubation :
– Normothermie : T°C ≥ 36°C
– Décurarisation complète : Curamètre > 90%
– Paramètres hémodynamique stables
– Reprise d’une ventilation spontanée
– Ouverture des yeux spontanée
– Reprise d’une déglutition

Le patient reste en SSPI jusqu’à obtenir un score d’Aldrete modifié ≥ 9
(Le score d’Aldrete n’est pas à savoir)

Partie 02 : Anesthésie loco-régionale

Principe : Bloquer la conduction nerveuse pour bloquer le message nociceptif

1. Produits anesthésiques locaux

> Doses maximales des anesthésiques locaux

- Lidocaïne : 6mg/kg
– Mépivacaïne : 5mg/kg
– Ropivacaïne : 3mg/kg
– Lévo-bupivacaïne : 3mg/kg
– Bupivacaïne : 2mg/kg

> Produits adjuvants

Allongent la durée du bloc sensitivo-moteur
– Adrénaline
– Clonidine
Morphiniques :
– Morphine
– Sufentanil
– Dexaméthasone
Ne doit plus être utilisé par sa toxicité nerveuse

2. Techniques d’anesthésies loco-régionales

Maintenant elles sont toutes réalisées sous échoguidage
Là où il existe un nerf accessible, il existe un bloc associé.

> Blocs périphériques

- Bloc de la face :
• Bloc du V2 ou du V3
• Bloc supra-orbitaire
• Bloc infra-orbitaire
• Bloc mentonnier
• Bloc nasal
• Bloc rétro-auriculaire

- Bloc cervical superficiel et profond

- Bloc inter-scalénique
Bloc de l’épaule et du membre supérieur

- Bloc axillaire
Bloc du membre supérieur

- Bloc digital

- Bloc paravertébral

- Bloc intercostal

- Bloc lombaire postérieur
Bloc de la hanche et du membre inférieur

- Bloc fémoral

- Bloc sciatique transglutéal
Peut être le seul où il est encore nécessaire de s’aider de la neurostimulation

- Bloc sciatique subglutéal

- Bloc sciatique poplité

- Bloc obturateur

- Bloc saphène

> Rachianesthésie

Bloc central pour chirurgie sous-ombilicale
Injection de bupivacaïne dans le canal rachidien au niveau de l’espace L3-L4 permet :
– Bloc sensitivo-moteur des racines rachidiennes de la moëlle
– Bloc sympathique

Attention : Le bloc sympathique va entraîner une vasoplégie de tout le territoire anesthésié !

Installation en 15min et durée de 2h sans adjuvant à :
– 3h avec 3 à 5 µg de sufentanil
– 12h avec 100 µg de morphine

Contre-indications :
– Troubles de l’hémostase
– Hypovolémie
– RAo serré
– Sepsis au point de ponction
– Refus du patient

Effets indésirables :
– Echec de la technique partiel ou complet
– Hypotension ++
– Rétention aiguë d’urine
– Prurit par les adjuvants morphiniques
– Syndrome post-PL (rare puisqu’on injecte au lieu de prélever)
– Rachianesthésie totale = Ascension du produit anesthésique jusqu’au racine médullaire respiratoire
– Trouble neurologique par ponction d’une racine médullaire → Décharge électrique descendante
– Méningite iatrogène
– Injection vasculaire (rare)

> Anesthésie péridurale

Bloc central avec possibilité de bloc différentiel = Bloc sensitif sans bloc moteur
Mise en place d’un cathéter dans l’espace péridural (moins profond que la rachianesthésie) par lequel sera injecté de la :
– Lidocaïne pour une efficacité en 5 min mais brève
– Ropivacaïne pour prendre le relai avec une efficacité plus longue
Après le bolus initial, le bloc peut être entretenu :
– En continu par une seringue électrique
– ± Bolus auto-administré (PCEA)

Contre-indications :
– Troubles de l’hémostase
– Sepsis local et général : Fièvre ≥ 38,5°C
– Refus de la patiente
Le tatouage au point de ponction n’est pas une contre-indication ! Il suffit de faire un pré-trou avant l’introduction de l’aiguille de Tuohy.

Effets indésirables :
– Echec de pose
– Efficacité partielle :
• Bloc incomplet
• Efficacité latéralisé
– Retrait du cathéter

- Brèche dure-mérienne
Responsable :
– d’un syndrome post-PL : Céphalées posturales (debout)
– d’une rachianesthésie par diffusion du produit
– Hématome compressif de moëlle
– Trouble neurologique par ponction d’une racine médullaire → Décharge électrique descendante (± Parésie et/ou Paresthésie du MI
– Hypotension moins importante qu’avec la rachianesthésie
– Epidurite / Méningite
– Injection vasculaire

3. Toxicité des produits anesthésiques locaux

> Toxicité nerveuse directe

Pas d’injection intra-nerveuse ! En plus d’être très douloureux, cela crée des nécroses cellulaires nerveuses

> Toxicité neurologique

Après résorption systémique, risque de :

- Signes subjectifs :
• Dysesthésies buccales
• Goût métallique dans la bouche
• Acouphènes
• Vertiges
• Diplopie

- Signes objectifs :
• Dysarthrie
• Confusion
• Epilepsie
• Nystagmus
• Strabisme

> Toxicité cardiaque

- Troubles du rythme
– Troubles de la conduction
– ACR

> Prévention de la toxicité des anesthésiques locaux

- Scope + PA + O² = Dépistage précoce de la cardio-toxicité
– Pose VVP
– Injection péri-nerveuse
– Test d’aspiration avant injection
– Injection lente et fractionneé
– Ne pas dépasser les doses max
– Connaître les signes subjectifs neurologiques = 1ers signes apparaissant
– Savoir prendre en charge une toxicité des anesthésiques locaux dès les 1ers signes

> Prise en charge de la toxicité des anesthésiques locaux

Toxicité nerveuse
Dès la décharge élecrique : Retrait de l’aiguille !
– Contrôle EMG si déficit
– TTT antalgique neuropathique
– Rééducation / Kinésithérapie si besoin
– Ergothérapie si besoin

Toxicité cardiaque ou neurologique
Dès les 1ers signes subjectifs :
– Arrêt de l’injection !
– Midazolam IVD 1 à 5mg
- Intralipides 20 % :
• Bolus 3ml/kg
• Puis continuer la perfusion jusqu’à 6-9ml/kg
– Prélèvement sanguin pour dosage de l’anesthésique local
Si aggravation :
– Maintien de la perméabilité des voies aériennes
– Ventilation en O2 pur
– Intubation trachéale dès que possible :
• En cas d’ACR
• En cas de convulsions généralisées
– Débuter le Massage Cardiaque Externe (MCE)
– Utilisation de vasoconstricteurs pour assurer une pression de perfusion d’organes :
• Ne pas administrer de fortes dose d’adrénaline (risque de renforcer le bloc induit par l’anesthésique local)
• Ne pas administrer d’Amiodarone (effet additif avec celui des anesthésiques locaux)
– Cardioversion en cas de fibrillation ventriculaire
– Surveillance en Réanimation → Risque de récidive par relargage

 Partie 03 :  Risques anesthésiques

Il est multifactoriel : risque anesthésique au sens propre + chirurgie + terrain

1. Induction

- Contrôle des voies aériennes :
• Intubation difficile
• Désaturation
• ACR hypoxique
• Pneumopathie d’inhalation
• Laryngospasme
• Bronchospasme

- Cardiovasculaire :
• Troubles du rythme :
▫ Tachycardie / Bradycardie
▫ ESA / ESV
• Hypotension artérielle

- Anaphylaxie :
• Réaction anaphylactoïde
• Choc anaphylactique (curares et ATB ++)
- Hyperthermie maligne

- complications des ALR

2. Risques liés à l’intervention

Anesthésiques :
- Hypothermie
- Compression des points d’appui
- Kératite par inocclusion palpébrale
- Retard de remplissage vasculaire

Chirurgicaux :
- Hémorragie
- Perforation d’organe
- Durée prolongée
- Oubli de matériel

3. Risques lors du réveil

- Hypothermie / Frissons
- Nausées / Vomissements Post-Opératoires (NVPO)
- Décurarisation incomplète
- Laryngospasme
- Bronchospasme
- Hémorragie

4. Risques liés au patient lui-même / Terrain

ATCD du patients :
- Cardiovasculaires :
• HTA
• Coronaropathie
• AOMI
• AIT / AVC
• Insuffisance cardiaque
- Respiratoires :
• BPCO
• Insuffisance respiratoire chronique
- Neurologiques :
• Epilepsie
• Maladies neuro-musculaires
• HTIC
- Troubles de la coagulation :
• Constitutifs :
▫ Maladie de Willebrand
▫ Hémophilie
▫ Déficit en facteur
• Acquis :
▫ Anticoagulant
▫ Antiagrégant
- Métaboliques :
• Diabète
- Allergies
- Chirurgicaux

Partie 04 : Obligations réglementaires

La prévention des risques anesthésiques est favorisée par plusieurs obligations réglementaires.

1. Consultation d’anesthésie

Au moins 48h avant l’intervention en dehors du cadre de l’urgence.
Objectifs :
- Recueillir les ATCD / Allergies
- Adapter le TTT habituel :
• Poursuivre
• Stopper
• Faire un relai (AVK ++)
- Rechercher les critères de ventilation et d’intubation difficile
- Informer le patient sur le jeun :
• Alimentation et Tabac : 6h avant
• Biberon de lait : 6h avant
• Liquides clairs (eau, jus de pomme, thé) : 2h avant
- Récupérer les examens paracliniques
- Prescrire les examens paracliniques manquant
- Informer des différentes techniques anesthésiques possibles
- Décider en accord avec le patient de la technique choisie
- Informer sur la transfusion
- Informer sur l’analgésie post-opératoire
- Lui remettre un document énumérant les risques anesthésiques
- Prescrire les TTT post-opératoires en cas de chirrugie ambulatoire

2. Visite pré-anesthésique

La veille de l’intervention si le patient est hospitalisé.
Pas de visite pré-anesthésique en cas de chirurgie ambulatoire.
Objectifs :
- Vérifier qu’il n’y a rien de nouveau depuis la consultation
- Récupérer les derniers examens paracliniques
- Rappeler les consignes de jeûne
- Prescrire la prémédication anxiolytique

3. déroulement de l’anesthésie

lieu reglementé

drogues d’urgence, chariot d’urgence avec défibrillateur, matériel d’intubation et d’intubation difficcile

surveillance : scope, capno, moniteur de curarisation

3. Salle de Surveillance Post-Interventionnelle (SSPI)

Après l’intervention, passage obligatoire en SSPI pour tous les patients ayant eu une AG ou une ALR
Non obligatoire pour les AL
Retour en chambre si :
- Score d’Aldrete modifié ≥ 9
- Au moins 1h après la dernière injection d’anesthésique local lors d’une ALR

4. Chirurgie ambulatoire

Critères d’éligiblité (SFAR 2009)
- Statut ASA I, II et III avec analyse du rapport bénéfice / risque
- Conditions de la compréhension et de l’acceptation des modalités :
• Patients non francophones accompagnés d’un traducteur
• Mineurs accompagnés d’un de leurs parents ou représentant légal
• Patients atteints d’un trouble du jugement accompagnés d’un tiers pouvant
- Lieu de résidence post-opératoire compatible avec la prise en charge ambulatoire (en fonction du type d’intervention et de la distance du plus proche établissemen médical conventionné)
- Formaliser une convention entre établissement afin de prévoir la prise en charge d’une complication éventuelle par un établissement de soins, autre que celui où a été pratiqué l’acte ambulatoire
- S’assurer que lors du trajet du retour à son lieu de résidence post-opératoire le patient ne conduise pas un véhicule et qu’il soit accompagné par un tiers
- Présence d’un accompagnant au lieu de résidence post-opératoire
- Au cours de la consultation pré-anesthésique, dispenser une information adaptée à la spécificité de la prise en charge en anesthésie ambulatoire concernant :
• Le jeûne et la gestion des traitements pris par le patient
• Les exigences liées aux différentes techniques d’anesthésie
• Les conditions de sortie et la nécessité d’être accompagné par un tiers pour le retour au lieu de résidence
• Les consignes liées aux suites éventuelles de la prise en charge anesthésique
• Les méthodes d’analgésie post-opératoire
• Garantir le bon respect des recommandations
• Les modes de recours en cas d’évènements non prévus
- D’informer le patient que la conduite de tout véhicule est proscrite pendant les 12 premières heures du fait de l’anesthésie
- Informer le patient des effets de l’anesthésie ou de la sédation sur les fonctions cognitives et sur la vigilance pendant les 12 premières heures
- Faire signer au patient le document expliquant les consignes qui rappellent les exigences de prise en charge ambulatoire
Cette signature n’engage pas la responsabilité juridique du patient et ne défausse pas celle du médecin.